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Assumer, ou enterrer ?

Comment devient-on sado-maso ? Faut-il passer à l'acte pour concrétiser ses fantasmes, ou est-il préférable d'ignorer des désirs que l'on juge soi-même honteux ?

Il en va du sadomasochisme comme de la plupart des déviances sexuelles : on n'en choisit pas la voie. On tombe simplement dedans quand on est petit ; on ressent un besoin difficile à exprimer, et l'on se retrouve face à un dilemme… enterrer ses envies au fond de soi, ou tenter de les assumer.

Refouler – consciemment – ses pulsions, ce n'est jamais simple. Cette image du curé qui se fouette le dos pendant toute la nuit afin de ne pas céder à la tentation de la masturbation, je pense que toutes les personnes victimes de troubles de la sexualité s'y sont reconnues un jour[4]. « Ce coup-ci, j'arrête mes pensées dépravées – je redeviens normal »… peine perdue. Le pervers, comme le dévot, verra immanquablement ses pensées impies remonter doucement, flottant à la surface de sa libido, et il n'y pourra rien.
Beaucoup de gens ont quelques penchants sexuels à l'écart des sentiers battus, qu'ils ne vivront jamais autrement que dans leurs rêves secrets… pour ceux-là comme pour les déviants, la vie ne s'en arrêtera pas pour autant. Simplement, les désirs inassouvis provoquent la frustration. Ils rendent triste, défensif, aigri parfois, et au vu de l'influence du sexe chez l'être humain, je reste persuadé qu'une énorme part de l'agressivité qui nous environne chaque jour provient directement de ce type de pulsions refoulées[5] – consciemment ou non, d'ailleurs, puisque certains trouveront involontairement refuge dans le déni.

Tenter d'assumer ses envies… d'abord, ce n'est pas si simple. Techniquement parlant. Soyons honnêtes, parmi ceux qui rejettent leurs instincts sexuels hors normes, on ne trouvera pas une majorité d'âmes prudes qui auraient fait un choix,[6] mais plutôt, au final, bon nombre de gens qui se sont heurtés à un mur en essayant de réaliser leurs fantasmes. Et beaucoup d'autres qui ont vu ce mur tout de suite, si haut qu'ils ont préféré ne rien risquer et conclure « trop haut pour moi » – ce qui ne fera, au passage, qu'attiser ces sentiments de rancœur et d'agressivité dont je parlais plus haut.
Assumer ses envies, dans le SM, si ça n'est pas si simple, ça n'est en outre pas nécessairement si bon. Certains masochistes se détruisent à petit feu – même sans partenaire, et même avec un partenaire qui n'est pas un sadique. Quant aux sadiques, aux « vrais » – j'entends au sens clinique du terme, que j'aborderai plus loin, et je me réfère ici à ces personnes qui trouvent plaisir dans la souffrance réelle des autres –, inutile de faire un dessin pour exprimer les dangers potentiels de leur éventuel passage à l'acte.[7]

Inhiber ses pulsions, ou tenter de les assumer ? Que faut-il faire ? Quelle est la bonne voix quand on a la grippe ; se gaver de médicaments, détruire doucement son système immunitaire, et sortir dans la rue comme si rien n'était, ou se reposer, caché, être malade comme un chien et attendre que ça passe naturellement, si l'on n'y passe pas soi-même ?
Je ne pense pas qu'il y ait une réponse absolue à cette question. Le mieux aurait été de ne pas contracter la grippe, bien sûr…
Quand on est déviant sexuel, il faut vivre avec sa déviance, et il est regrettable de se voir condamné trop vite par l'opinion publique sur un instinct pour lequel on ne vous a, à la base, donné aucun choix, et auquel ne subsiste en vous qu'un dilemme qui ne connaît pas de juste solution.

Enterrer ses désirs au fond de soi, ou tenter de les assumer… enterrer, pourquoi pas, si l'on y arrive – mais il faut alors se garder de finir comme ces anciens fumeurs qui ne supportent plus l'odeur d'une cigarette à cent mètres tant leur envie d'en prendre une les obsède.

Assumer… je n'apprécie pas le mot, dans ce contexte, car il colporte une idée de logique gagnante que je ne cherche pas à défendre. Je n'aime pas le terme… je ne sais pas si c'est la meilleure, mais c'est toute de même la voie de ceux qui ont choisi de désinhiber leurs pulsions que je vais commenter ici – parce que j'en fais partie, parce qu'il y a certainement davantage à en dire, mais aussi parce que je n'ai jamais lu ailleurs l'explication que j'aimerais présenter à mes proches si un jour je décidais de leur confier mon goût pour les jeux de domination et de soumission – ce qu'à trente-huit ans, en l'an 2005, je n'ai toujours pas fait.

 

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[4] Tout comme la plupart des jeunes gens aux mœurs sexuelles plus standardisées, d'ailleurs : la découverte de sa sexualité, quelle que soit sa nature, a souvent un côté pénible.

[5] Oui, bien sûr, il y a beaucoup d'autres générateurs de ressentiments, qui n'ont rien à voir avec le sexe – heureusement.

[6] En tout cas pas dans le BDSM. Dans d'autres déviances, c'est certainement différent : un individu qui ressent des envies pédophiles par exemple, a une bonne raison de refouler ses pulsions. Un procureur général qui éprouve le désir de porter des couches-culottes aussi, probablement, parce que la honte générée par l'image peut se révéler plus puissante que ses propres fantasmes, auxquels il résistera alors de lui-même (il procurera certainement d'autant mieux ainsi, d'ailleurs).

[7] À ce sens « clinique » du terme sadique, j'oppose son approche « philosophique », certes discutable, mais en tout cas plus inoffensive : nombre de personnes ayant lu les œuvres du « Divin Marquis » voient en lui le chantre d'un certain épicurisme sexuel. Ils se prévalent de ce qu'ils perçoivent comme son idéologie, sans pour autant éprouver l'envie de blesser quiconque.


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