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Ce document, rédigé en 2002, a été mis à jour en 2006.
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Subspace, la jouissance de la soumise ?
Subspace... le terme est allégorique, qui décrit ce moment où la soumise se sent plus dévouée et obéissante que jamais comme un véritable monde parallèle, un espace-temps où les réalités sont altérées, une dimension où les pensées sont biaisés, où l'obéissance règne, où seuls comptent les mots et actes du dominant. Mais si tant de soumises ont reconnu leurs propres sensations dans ce terme au demeurant pompeux, ce n'est certainement pas par hasard: comment définir la jouissance, particulièrement lorsqu'elle est si personnelle, si cérébrale, si difficile à communiquer ? Le mot ne figure pas dans le dictionnaire, pas sous ce sens. Mais dans tous les corps de métiers, toutes les sciences, tous les arts et toutes les matières, la richesse du vocabulaire permet d'écourter et donc d'élever le débat. Si demain une soumise décide de parler d'un de ces moments précieux, elle pourra le faire comme je le fais dans le texte ci-dessus, dans le détail. Mais si c'est d'autres passages qu'elle désire parler, elle pourra planter simplement le décor en disant: "j'étais alors en plein subspace, je n'y pensais pas". Le mot est froid, pour refléter de si chauds sentiments, et d'aucuns argumenteront sans fin sur le fait que son interprétation en est toujours personnelle, variable selon les individus... je ne souscris pas à cette idée. Il n'y a pas de mot pour définir cet état dans lequel on se sent plongés, lorsque l'on fait l'amour et que les deux corps se retrouvent en communion, les deux esprits immergés entièrement dans l'acte lui-même, ce moment où plus rien ne compte sinon les sensations que l'on éprouve et partage, cette longue jouissance, source de tous nos désirs, bien plus précieuse que l'orgasme lui-même... Dans un esprit aux goûts sexuels déviés, où la soumission peut remplacer l'acte d'amour, ce moment a un nom, on l'a baptisé subspace. Et comme les jeux du bondage ne ressemblent pas toujours aux jeux du sexe, il est bien des façons d'atteindre ou d'effleurer ce sentiment magique et effrayant, s'y retrouver intégralement plongée ou venir le taquiner, s'y brûler un petit peu les ailes pour s'en éloigner et y revenir... Une soumise qui n'a encore jamais été dominée pourra ressentir la piquante chaleur du subspace sur sa peau en s'entendant simplement édicter des consignes pour la première fois. Une soumise expérimentée aux instincts masochistes pourra ne commencer à l'entrevoir qu'au trentième coup de fouet sur sa peau, alors qu'elle sera fermement attachée, écartelée. Ensuite, pour l'une et pour l'autre, il pourra y avoir des variations d'intensités; celle-ci parlera de subspace sitôt qu'elle sentira ses pensées y glisser, celle-là sacralisera le terme et ne l'emploiera que pour parler de ces moments où elle s'y est sentie intégralement plongée. Mais toutes deux parleront en fait de la même chose. Le subspace, ce n'est pas l'orgasme, mais la jouissance de la soumise; ce moment où les pensées commencent à basculer, s'altérer, où la soumission semble devenir la seule voie possible, où quoi que l'on puisse dire ou faire, c'est sur le chemin de l'autre qu'on le fait. Être en n'importe quel endroit de ce chemin, c'est être dans le subspace. Y être allé une fois signifie vouloir y retourner. La route qui y mène n'est pas simple, mais, comme en hypnose, on en retrouve plus facilement la voie après quelques visites. Ensuite... on souhaite y rester le plus longtemps possible, avancer sur le chemin, et là, c'est au dominant de veiller à protéger la soumise d'elle même, l'empêcher d'avancer trop vite, tempérer son approche pour faire en sorte que lui et elle ne manquent rien du paysage sur cette route qui peut être aussi magnifique que destructrice. En BDSM, on parle couramment d'échange de pouvoir, d'accord consensuel de perte de liberté pour la soumise. Passer le pouvoir, laisser toutes les décisions à l'autre, demeurer soi-même tout en se sentant à la permanente merci du dominant, ne plus rien oser faire qui lui déplaise, sentir tout le poids de sa propre impuissance, c'est ce que recherchent beaucoup de soumises, sinon toutes. Au moins en fantasmes. Mais dans ce type de relations, le rêve peut devenir réalité au moment où l'on s'y attend le moins... un ordre qui semble tomber au hasard; précisément celui qu'on n'aurait pas voulu entendre, peut-être au mauvais endroit, au mauvais moment... que faire alors ? Mille choses peuvent passer en tête, lorsqu'on reçoit un
ordre. La plupart du temps, si l'on n'est pas déjà en plein
subspace, on commence par le juger. "fermer mes yeux ? Tout de
suite ? Ici, dans ce wagon de métro ? Il ne se rend pas compte.
Les gens vont me regarder, ils vont penser que je suis folle... et puis,
si quelqu'un monte, que je connais... et si..." Mille choses peuvent passer en tête, lorsqu'on vient de se faire punir, fouetter, fesser... La punition, c'est un peu le "j'y tiens" du dominant ci-dessus, la preuve que oui, il désire voir sa soumise vraiment obéissante. Pour celle-ci, ce peut-être un passe-droit, une sorte de mandat que lui donne son maître; "les choses que tu vas faire, c'est moi qui te les fais faire. Ce n'est pas toi - ne te juge pas, n'analyse pas, obéis, simplement". La punition, c'est aussi, immanquablement, une motivation de plus pour obéir, une référence qui va aider la soumise à rapidement trouver réponses à ses questions intérieures, des réponses totalement biaisées, dans un jeu aux règles absolument injustes, qui vont ainsi la conduire à ne plus pouvoir penser objectivement, et ne lui laisseront d'autre choix que l'obéissance. Ce moment où elle va peut-être en venir à oublier que le jeu est consensuel, que son partenaire l'aime, que c'est de son plein gré qu'elle lui a conféré un tel pouvoir sur son corps et son âme, cet instant où, oubliant tout cela, elle va se mettre à le craindre et où elle sera prête à tout pour le satisfaire et éviter une nouvelle punition scellera son entrée immédiate dans le subspace, pour un moment qui durera peut-être aussi longtemps que la séance elle-même. Mille choses passent en tête, lorsqu'on est attachée. L'une
d'elle est: "puis-je me détacher seule ?" Si
la réponse est non, alors le passage de pouvoir a eu lieu.
Le passage de pouvoirs... pas l'entrée en subspace. Tant
que les pensées sont claires, tant que l'on ne ressent pas tout
le poids de cet échange qui vient d'avoir lieu, on peut attendre
calmement, attachée mais sereine. On se dit: "si je lui
demande de me libérer, il le fera." Une chose passe en tête, une seule, lorsqu'on est attachée et que le dominant décide de vous chatouiller: s'en sortir, par tous les moyens possibles. C'est un jeu très, très dangereux - physiquement pour la soumise, qui sur l'instant sera prête à s'arracher le bras pour se libérer, et moralement pour le couple, car les insultes et menaces risquent de pleuvoir. C'est peut-être une des manières les plus cruelles et les plus sûres de faire atteindre le subspace à une soumise, qui illustre parfaitement l'ambiguïté de cette dimension parrallèle étrange où l'obéissance règne. Le subspace n'est pas atteint durant les chatouilles, il l'est ensuite. Si aucun safeword n'a été prononcé, si le dominant a su résister aux insultes et menaces, si la soumise est toujours aussi attachée, plus que jamais consciente de son impuissance et du pouvoir que détient sur elle le dominant, alors... en cet étrange moment, celle-ci se sentira plus que jamais prête à tout pour éviter que le supplice ne recommence. Quoi que l'on puisse en dire, le subspace est une zone dangereuse, qui peut malheureusement être atteinte par une soumise dans les mains d'un dominant qui ne la connait pas... le fait est, la domination aveugle plus encore que l'amour. L'un des ingrédients majeurs à la réussite d'une relation, c'est la confiance. La connaissance de l'autre s'acquiert avec le temps, et ne pourra jamais être telle qu'une soumise puisse entièrement et aveuglément s'abandonner à son partenaire, sinon en se détruisant elle-même. L'un des ingrédients majeurs à la composition d'un bon maître, c'est la capacité de garder la tête froide. On ressent bien l'entrée en subspace de la soumise, de l'autre côté de la cravache. Ce n'est surtout pas un crédit pour faire n'importe quoi. Cet instant, c'est le cadeau de la soumise à son dominant, mais c'est également le moment où celle-ci a le plus besoin de soutien, de guidance, en même temps que de fermeté. Il est parfois difficile pour un dominant d'accepter le fait qu'en plein subspace, sa soumise est bien. Si celle-ci se met alors à se comporter comme un pantin qui ne sait qu'obéir, alors c'est qu'elle a, elle, encore beaucoup à apprendre sur la soumission. Si par certains signes elle montre son désir maladroit d'aller plus en avant sur la voie de la soumission, c'est au dominant de la retenir et de tempérer les ardeurs de la soumise, qui ne comprend peut-être pas elle-même ce qui lui arrive. Ces instants sont des jouissances, à savourer comme il se doit par les deux parties. À défaut de briser la personne elle-même, le dominant qui oublierait ses responsabilités pourrait très bien détruire la soumise, s'il ne sait pas la protéger d'elle-même. Combien de dominants ont voulu trop en faire pour montrer leur talent, ou ont simplement trop écouté les envies de leur soumise en oubliant leur rôle de protecteur, combien de soumises se sont retrouvées face au constat qu'elles en avaient beaucoup trop fait, trop vite, et qu'elle devraient reprendre la route du début, en pensant, cette fois, à regarder le paysage sur leur passage et à en savourer enfin les détails ? Le subspace n'est pas le point G de la soumise, le but à atteindre à tout prix. La confiance, l'écoute, la discussion et la connaissance de l'autre sont les vrais points à rechercher dans ce type de relation, et c'est d'eux que naîtra, immanquablement, ce doux plaisir d'abandon que l'on appelle subspace. L'accélérer, c'est détruire la soumise. Chercher à le maintenir trop longtemps, c'est épuiser les deux partenaires, les vider de toute leur énergie, car le subspace en est grand consommateur, des deux côtés de la cravache.
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