Il était une fois un royaume merveilleux, un royaume
où les hommes vivaient en paix. Nul n’y connaissait
la faim ; en tous temps les étals des marchands y étaient
garnis des fruits les plus rares, les tables des auberges se
paraient des meilleurs gibiers, des vins les plus délicats
au palais. Partout dans cette contrée les arts étaient
célébrés : des ruelles les plus sombres
aux tavernes les plus populaires, on pouvait entendre mille chants
célébrer la joie, l’amour, et les mille bonheurs
de la vie. Des échoppes étaient tout entières
consacrées aux senteurs, d’autres aux soieries les
plus douces, on y travaillait simplement, sans grand peine, et
quand le soir venait, les gens aimaient à se retrouver
pour célébrer leur bonheur, ici en dansant, là en
se délectant de quelque nouvelle histoire merveilleuse
imaginée par des conteurs de ces temps.
Les sciences et les cultures étaient la gloire de ce
royaume, où l’on réservait les meilleurs
mets, les plus grands palais et les carrosses les plus somptueux
aux auteurs les plus populaires ou aux plus grands savants, quand
d’autres gardaient ces délices à l’attention
de leurs plus vilains dictateurs.
Ici, la paix et le bien étaient de rigueur ; des magiciens à la
solde du Royaume s’affairaient à soigner les corps
en peine, des soldats s’occupaient à traquer le
mal partout où il pouvait se terrer, tandis que des professeurs
se chargeaient de veiller à l’éducation de
tous les jeunes gens sans exceptions de couleurs ou de religions.
Dans ce royaume glorieux, il était une citadelle merveilleuse,
bijou de la contrée, centre des sciences et des arts,
berceau des troubadours, rendez-vous des musiciens, des conteurs
et des marchands d’étoffe ; une cité si belle
et si illustre que les hommes l’avaient baptisée
la Ville Lumière…
Dans cette citadelle, à l’abri des murs de sa petite
maison, dormait une princesse. Elle était belle comme
le jour, et son sourire nocturne illuminait la chambre obscure
comme une petite perle qui aurait brillé dans son coquillage,
tout au fond de la mer. Ce sourire, Prune – car Prune était
son nom – ne pouvait le trouver ailleurs que dans son sommeil.
Ses jours, elle ne les aimait pas, car elle ne comprenait pas
ce monde. Elle se sentait exclue de ce royaume, oubliée
du bonheur qui semblait rayonner dans toutes les autres maisonnées,
et il n’y avait guère que dans son sommeil qu’elle
pouvait trouver la joie et l’oubli. Alors, la princesse
dormait. Parfois, elle rêvait. Et parfois, elle souriait.
Cette nuit-là, il y avait une perle dans la chambre de
Prune, et la lumière de son chaud sourire venait en caresser
les murs aux peintures écaillées. Derrière
ses paupières délicates aux longs cils enjôleurs,
les yeux s’agitaient aux rythmes de son rêve : le
Prince venait de lui intimer l’ordre de joindre ses mains
dans son dos, il s’approchait maintenant d’elle et
de ses fesses encore chaudes, il venait de se saisir d’une
longue corde de coton blanc.

La sonnerie oppressante du réveil-carillon retentit dans
la chambre pour annoncer les sept heures, et les murs s’éteignirent
aussitôt avec le sourire de la princesse.
Quatre vingt minutes plus tard exactement, alors que Prune, habillée
et prête pour ses corvées du jour, savourait sa
huitième cigarette et son sixième café avant
de se rendre au travail, retentissait une sonnerie similaire, à l’autre
bout de la Cité de Lumière.
Myrmé appuya sur le levier « encore cinq minutes » de
son coucou-réveilleur pour la quatrième fois ce
matin, le manqua cette fois et heurta le bouton « ne
coucoute plus du tout »,
constata son erreur mais l’oublia aussitôt, et se
rendormit.
Il était onze heures lorsque Prune regarda le monde par
la fenêtre de son lieu de travail, se dit une nouvelle
fois que quelque chose n’allait pas et conclut, comme à son
habitude, que ce quelque chose, ce devait être elle.
Il était exactement la même heure lorsque Myrmé arriva
au travail et envoya à son collègue un regard silencieux
qui disait : « j’ai travaillé dur hier, ce
n’est pas le moment » – quand la vérité était
que la veille, il avait tout simplement oublié de travailler.
Myrmé aimait ce royaume ; il adorait ce monde, tellement
que s’il lui avait été donné de le
refaire, il l’aurait refait exactement à l’identique.
De toute façon, qui lui aurait demandé de le refaire
? Et puis, qui en aurait le pouvoir, après tout ? Non,
tout cela resterait comme tel, et ce qui importe, c’est
moins les choses que la perception que l’on en a : si quelque
chose est déplaisant, on n’a qu’à l’éviter,
ou changer sa façon de le ressentir, et voilà.
La beauté se trouve partout, et elle se trouvait plus
encore partout dans ce merveilleux royaume de pacotille, cachée
derrière chaque décor, en chaque citoyen, aussi – en
chaque citoyenne, surtout.
Myrmé se servit un café, prit un cigare, puis descendit
voir s’il n’y avait pas quelques nouvelles beautés à découvrir,
au pied de la tour ou dans son propre esprit. Il était
alors onze heures et vingt minutes, et la princesse Prune entendait
pendant ce temps son amie lui raconter ses malheurs, et elle
se disait : « tout le monde est heureux dans le Royaume.
Tout le monde, sauf moi, et les gens que je connais. »
« Personne n’est heureux en ce Royaume – c’est
incroyable » se dit Myrmé en regardant un petit
rat heureux qui s’enfuit pour le coup sous les buissons
du pied de la tour. « Moi je suis heureux, se répondit-il.
Je suis heureux, et mon bonheur n’a besoin de rien que
je n’aie déjà. Quand bien même je n’aurais
rien du tout, d’ailleurs, je serais sûrement heureux.
Non, rien, il n’y a rien qui pourrait m’apporter
plus de bonheur », conclut-il en faisant un petit nœud
coulant d’un bout de ficelle qui traînait dans le
fond de sa poche.
Le soleil se coucha comme à son habitude sur la Ville
de Lumière ce soir là, et le Prince vint retrouver
Prune dans son sommeil. « Je vous souhaite obéissante,
ma princesse » lui murmura-t-il à l’oreille.
Les mains viriles étaient posées sur sa taille
délicate, elle se sentait possédée, envahie,
et ce sentiment lui était si doux… plus de responsabilités,
rien à décider… obéir… peut-être
lui ferait-il l’amour cette nuit, peut-être la prendrait-il
sauvagement, après l’avoir fessée de ses
mains trapues…
Le prince leva doucement la robe de Prune, révélant
les chairs roses et sensuelles de son postérieur. Ils
parcourut celui-ci de la main, tout en lui parlant de quelques
désobéissances récentes. La princesse sentit
son corps frémir, puis le premier coup tomba, aussi piquant
que délicieusement excitant. D’autres suivirent,
beaucoup d’autres, qui firent Prune se sentir abandonnée,
noyée dans un flot d’émotions mêlées.
C’est alors qu’il la prit, sauvagement, et Prune
jouit dans ses rêves.
 Les jours qui suivirent, la princesse les vécut très
mal. Elle cherchait en elle la cause de ce qu’elle appelait
son mal, en ses souvenirs les raisons d’une telle décadence
morale… ce rêve n’avait pas seulement été très
réel, il avait été bon – et cela,
elle ne l’acceptait pas. Un prince, c’est quelqu’un
de bon, un homme qui vous invite à danser ou voir les
spectacles de troubadours, qui vous susurre des poèmes à l’oreille
et vous enlace tendrement, oui, voilà, c’était
de cela que Prune aurait dû avoir envie. Les femmes n’étaient
plus des objets dans ce Royaume, et ce depuis bien des générations
; elles étaient les égales des hommes, oui, et
tous ces rêves avilissants étaient moralement inacceptables
pour la princesse, et jamais de toute façon elle ne pourrait
aimer quelqu’un qui la considérerait comme son esclave,
et c’était hors de question d’essayer, et
voilà.
Il pleuvait sur la Cité de Lumière comme sur tout
le Royaume ce soir là, et Prune rencontra le Prince dans
un jardin ensoleillé par les lueurs du crépuscule – probablement
le jardin de quelque nouveau palais que le fourbe aura acheté,
se dit-elle dans son rêve. Elle était nue ; son
cou, seul, était paré d’un collier – un
collier de métal garni d’un lourd anneau, dont pour
quelques raisons elle ne pouvait se défaire. Le Prince
fit mine d’ouvrir la bouche, mais aussitôt elle lui
déclara qu’elle ne lui obéirait pas, qu’elle
ne lui obéirait plus. Le prince eut un léger sourire,
qui la fit frémir d’excitation. Elle tacha de n’en
rien montrer, et de la main, décida on ne sait pourquoi
de protéger son sexe du regard de ce Prince mécréant.
Toujours souriant, il avança doucement vers elle. Elle
recula. Il accéléra le pas, elle fit aussitôt
volte-face et partit en courant.
Le Prince courait bien plus vite qu’elle, de surcroît
il portait des chaussures, lui, et tout cela parût à Prune
d’une injustice aussi terrible qu’excitante. Il la
rejoignit, la dépassa, puis se saisit d’elle en
l’attrapant par l’anneau de son collier, dans lequel
il venait de passer l’index. La princesse frissonna d’humiliation à ce
geste, et se débattit de toutes ses forces. « Vous êtes
un rustre, un mécréant, une insulte à toutes
les femmes », lui cria-t-elle, essayant les mots là où la
résistance physique avait échoué. « Tais-toi.
Si tu parles encore, chienne… »
Prune ferma les yeux, et hurla. Lorsque enfin elle les rouvrit,
après avoir expulsé jusqu’au dernier souffle
de ses poumons, tout autour d’elle avait changé.
Elle n’était plus dans un jardin, mais dans une
grande salle sombrement éclairée. Sous ses genoux,
il y avait les dalles froides d’un carrelage ancien. Elle
osa un bref regard alentours, puis réalisa que son corps était
enchaîné. Un nouveau frisson lui parcourut le corps.
Elle n’osait plus lever le menton. Derrière le Prince,
elle avait aperçu une grande cage, dans laquelle de lourdes
menottes pendaient à leurs chaînes, et il y avait
ces outils mystérieux à l’aspect barbare,
sur une table toute proche – trop proche…

Myrmé se leva de bonne heure le matin qui suivit ce nouveau
rêve de la princesse – de bonne heure selon ses critères.
C’était un vendredi, veille de repos donc, car on
ne travaillait pas les deux derniers jours de la semaine dans
ce royaume merveilleux. Et puisque la soirée qui s’annonçait était
potentiellement plus longues que les cinq précédentes
pour la plupart des citoyens, Myrmé avait décidé qu’il
la passerait à l’Agora des Fous – mais il
me faut faire ici une pause pour donner quelques explications
au lecteur, sous la forme d’une parenthèse que je
n’ouvrirai pas…
Dans ce Royaume merveilleux, oublié aujourd’hui,
et plus encore dans l’illustre Ville des Lumières – le
croirez-vous ? –, il n’y avait pas que des gens biens.
Certains étaient même, disons-le, plutôt étranges,
qui semblaient ignorer les mille bonheurs mis à leur disposition
par le Roi. Ceux-là remettaient en cause des préceptes établis,
ignoraient les règles en usage dans la Cité, et
semblaient, aux spectacles des troubadours ou des Grand Conteurs,
préférer parler entre eux et faire le Diable sait
quoi lorsqu’ils se réunissaient. Tout les honorables
citoyens du Royaume savaient pertinemment qu’il fallait éviter
ces gens-là comme la peste, leur montrer de la pitié ou
du dégoût parfois, afin de les aider à retrouver
le chemin des vraies beautés du Royaume.
Hors, la Cité des Lumières étant ce qu’elle était
alors, certains de ces citoyens pour le moins étranges
avaient trouvé le moyen de détourner quelques préceptes
Royaux d’ouverture et de liberté pour s’organiser
en une sorte de secte mystérieuse, et se réunir.
L’un de ces lieux de réunion se nommait l’Agora
des Fous, et cette dernière phrase clôt ici la parenthèse
que votre humble serviteur s’est permis de faire sans même
l’ouvrir.
- Je m’appelle… euh… Brune, dit
Prune au fou chargé de demander leur nom aux visiteurs
de l’Agora,
comme l’appelaient familièrement les fous.
- Bonsoir, Brune, répondit le fou-ouvreur, d’un
ton qui semblait implorer « nous ne sommes pas fous,
ici, et surtout pas moi »
Le lieu ressemblait à une sorte de petit palais romain,
avec des colonnes, un escalier de pierre, quelques statues éclairées
par de hauts chandeliers, et un toit qui, ici et là, laissait
passer la lumière du ciel nocturne. Plusieurs salles venaient
se connecter à la place centrale par de hauts passages
voûtés, et – la princesse l’avait entendu
dire – les fous se groupaient dans ces salles par affinités.
Elle les parcourut toutes du regard, s’approchant des passages
sans s’y aventurer, hésitant à chaque pas.
L’une d’elle retint son attention, mais Prune n’en
laissa rien paraître, et continua sa revue des lieux comme
si de rien n’était. Bien sûr, c’était
celle-là. Bien sûr. Mais le lieu lui avait fait
plus horreur encore qu’il ne l’avait attirée.
Prune décida de partir, mais à ce moment, un nouveau
visiteur entra, que le portier salua d’une « bonjour
Myrmé ». Un fou habitué, se dit Prune. Elle
changea légèrement de direction, décidant
que sortir maintenant, ce serait paraître effrayée.
Ne pas vexer les fous, se remémora-t-elle. Et puis, rien
ne pourrait l’effrayer plus que son dernier rêve,
que les sensations qu’elle en avait ressenti. Non, rien
ne pourrait l’effrayer plus que cela, plus qu’elle
s’effrayait elle-même – et certainement pas
un de ces pauvres fous.
Elle considéra celui qui venait d’entrer. Le pauvre
n’avait rien pour lui, et devait cacher bien des misères
intérieures. Elle suivit ses pas de loin, et le vit entrer
sans hésiter dans ce même couloir qui menait à cette
salle qu’elle osait, elle, à peine regarder.
Prune fit un pas en avant, stoppa net, recula, s’interrompit
encore, puis décida de réfléchir. Elle aurait
voulu suivre son instinct et sortir, partir, retourner à son
foyer pour se plonger dans les draps de son lit, oui, plonger
dans le lit, et… dormir…
«
Chienne ». Il l’avait appelé chienne. Prune
eut la nausée à ce simple souvenir, et c’est
ce mot, le profond dégoût qu’il lui inspirait,
qui donna à la princesse la force de ne pas suivre son
instinct. Il fallait qu’elle sache. Elle se sentait malade,
malade de faire de tels rêves, malade du plaisir démoniaque
qu’elle pouvait tirer de certaines situations, et là,
là, c’était allé vraiment trop loin.
Chienne… ce mot horrible ne lui inspirait que du dégoût – aucun
plaisir ici – mais peut-être se mentait-elle après
tout, et comment distinguer le faux du vrai, et d’où cela
lui venait-il, quels lointains souvenirs enfouis dans son esprit
pouvaient lui inspirer de tels fantasmes, Prune ne savait plus.
J’irai, pensa-t-elle. J’irai, et j’en aurai
le cœur net. Je ne pourrai jamais chasser cela de mon esprit,
alors, s’il le faut, je les laisserai m’insulter,
me brutaliser, m’humilier. Peut-être guérirai-je… ou
peut-être ne suis-je bonne qu’à cela, inadaptée à ce
monde, peut-être ma place est-elle avec les fous, les autres fous…
Le couloir n’était pas bien long, Prune en examina
les pierres du plafond voûté, garni de quelques
torchères sur lesquelles des flammes dansaient au rythme
des courants d’air chauds, elle évita de trop regarder
les menottes qui ornaient ça et là les vieux murs,
et c’est ainsi, le nez pointé au ciel, qu’elle
fit son entrée dans la salle redoutée.
- Bonsoir, Brune
- Bienvenue, Brune !
- Bonsoir, Brune
La princesse réalisa que ces voix inconnues s’adressaient à elle,
par ce nom qu’elle portait inscrit sur le badge remis par
l’ouvreur et épinglé sur sa robe, et sentit
sa nuque se raidir sous l’effet de la nervosité tandis
qu’elle baissait la tête pour considérer la
salle.
C’était, assurément, une grande pièce.
Elle aurait pu aisément contenir une centaine de personnes,
mais Prune n’en dénombra qu’une dizaine sur
l’instant. La salle était faite comme une sorte
d’octogone auquel on aurait ajouté quelques turgescences
ici et là, des dénivellations au sol dont le carrelage
se voyait interrompu par quelques larges marches plantées
ici on ne sait pourquoi, une espèce d’estrade excentrée
probablement destinée à d’éventuels
orateurs, des colonnes encore, des chaînes, des poulies,
des fouets aux murs, une cage, une large croix de bois garnie
d’épaisses sangles de cuir, des fauteuils et des
divans, et tout autour, tout autour, des petites alcôves, éclairées à la
lueur de petites bougies rondes et rouges aussi larges que hautes.
Les alcôves faisaient à peine deux mètres
de profondeur sur un peu moins de large, et étaient toutes à peu
près identiques : une table en garnissait toute la longueur,
et un banc de bois de chaque côté, le long du mur,
aurait permis à quatre personnes – six, peut-être – de
s’y attabler.
Les alcôves étaient ainsi faites que les gens pouvaient
s’y parler, y suivre les discours des orateurs de l’estrade
centrale ou même participer ou réagir à d’éventuels
débats.
Pour l’instant, il n’y avait guère qu’une
poignée de personnes dans la partie centrale, assis ou
allongés sur de larges fauteuils, et ils ne disaient rien.
Trois des alcôves étaient occupées par des
personnes seules, une autre hébergeait un couple en grande
conversation, et Prune reconnut en l’homme ce Myrmé qu’elle
avait vu entrer tout à l’heure. Nerveuse, la princesse
opta pour une alcôve vide qui se trouvait tout près,
et prît place à la table en se demandant si un tavernier
viendrait bientôt pour lui faire passer commande.
Plusieurs personnes l’avaient suivi du regard jusqu’à son
alcôve. L’une d’elle s’approcha immédiatement,
une gourde et deux gobelets d’étain à la
main. C’était un homme, jeune, plutôt séduisant.
Sa démarche était décidée, son œil
clair, et sa voix, seule, semblait là pour trahir son
manque d’assurance lorsqu’il lui dit : « Bonsoir,
Brune. Comment va, ce soir ? Je peux m’asseoir ? »
La princesse fit un oui de la tête, qui ne trahit rien
de l’appréhension qui lui rongeait l’estomac.
Le fou lui offrit une bolée de vin blanc, qu’elle
accepta.
- Nouvelle, ici ? demanda-t-il
- Oui, oui. Enfin… non, pas vraiment…
- Soumise ?
- Oui, fit la princesse d’une voix décidée,
tout en baissant la tête
- Bien. Je suis, moi, un dominant, rétorqua l’inconnu.
Prune ne dit rien, mais sentit son cœur chavirer.
- Que recherches-tu ? demanda-t-il brutalement
- Je…
Prune avala sa salive avant de poursuivre.
- Je fais de ces rêves… des rêves où le
Prince… il m’a appelé « chienne »,
et…
- Bien, chienne. C’est ainsi que je t’appellerai,
et tu…
Des larmes perlèrent dans les yeux de la princesse, qui
interrompirent le fou tout net dans son propos. Il semblait soudain
décontenancé. Prune, elle, se sentait mourir à l’intérieur.
- Pardon… poursuivez, dit-elle humblement
- « …Maître », corrigea-t-il
- …Poursuivez, Maître, je…
Une voix féminine dans la salle demanda soudain tout
haut : « tout
va bien, Brune ? ». Cette question horrifia la princesse.
Elle répondit que oui, mais l’homme se leva soudain,
et quitta l’alcôve sans mot dire, emportant avec lui
bouteille et gobelets vers l’alcôve suivante,
où l’attendait une jeune femme souriante.
à suivre...

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