Je ne vous redirais pas ici mon point de vue sur la douleur,
la préparation du Maître et la confiance de la
soumise, je pense que vous avez maintenant compris l’importance
qu’il faut y accorder.
Mais il est nécessaire que la séance se pratique
dans une bonne ambiance ; et ceci dépend de chacun pour
ce qui concerne le fond sonore, le moment de la journée
(il faut que les deux partenaires soient à l’aise,
dans de bonnes conditions psychologiques : si les soucis de
la vie courante vous minent ce n’est pas le bon moment).
N’hésitez pas à vous faire plaisir… La
luminosité par contre se doit d’être suffisante
pour que le Maître soit sûr de ses gestes – pour
ma part, un bandeau sur les yeux me permet de rejoindre plus
rapidement les oiseaux, ce qui n’est peut être
pas votre cas…
Le chat à neufs queues est le cousin du flogger :ses
effets sont quasiment identiques. Il porte pour moi bien son
nom : son souffle est plus rauque, ses extrémités
plus piquantes, ses lanières plus cinglantes que le
flogger et j’ai en fait l’impression d’être
massée par un félin aux griffes lourdes et aériennes.
Reprenons point par point : d’abord, le souffle ; plus
rauque, très chaud, il ressemble pour moi à un
feulement. De même lorsque vient le mouvement de repli,
celui-ci est plus sec et sans l’effet rafraîchissant
dont je vous parlais tout à l’heure.
Les pointes des lanières me font l’effet de petites
pelotes de griffes émoussées, comme une légère
dermabrasion (vous faites la vaisselle, et au lieu de frotter
l’assiette avec le grattant vert de l’éponge,
vous griffez le dos de votre main une fraction de seconde avant
de vous rendre compte de votre erreur). Quant aux lanières,
plus pesantes, elles me donnent l’impression très étrange
que ma peau éclate en bulle de savon à leur contact.
Loin d’être désagréable, cela me
fait sentir plus légère, comme si mon corps se
délestait d’un poids à chaque explosion
de bulle.
La sensation de douleur est différente aussi : au lieu
de s’effacer quasi-instantanément, elle « cuit » quelques
secondes (en fait, cette cuisance persiste de plus en plus
longtemps à mesure que les coups se répètent
aux mêmes endroits) et ma gymnastique mentale consiste
alors à m’imaginer cela comme autant de légers « coups
de soleils ». Mon délire est de fait plus brillant
: le félin qui me masse se transforme en boule de feu…Vous
voyez le Professeur Tournesol dans Tintin et le Temple
du Soleil, lorsqu’il est assailli par la boule d’orage
? C’est exactement cet effet, mais en mieux…
Le relâchement final est identique, quoique je le trouve
plus difficile à maîtriser. Paradoxal : maîtriser
son abandon ! Mais c’est bien la marche à suivre
si vous voulez profiter au maximum des sensations qui vous
assiègent - je n’aime pas laisser un tel désordre émotionnel
s’installer, car je veux jouir pleinement de chaque instant,
de chaque mouvement, de chaque pensée.
Je ne peux vous dire ce qu’il advient de mon Maître
lors de ces séances car tout ceci me rend profondément égoïste à mon
propre vécu ; quasiment autiste à tout ce qui
n’est pas moi, je me fonds en moi-même et ne m’appartiens
plus.
Le plus agréable dans tout ceci ? C’est de retrouver
la réalité des bras de mon Maître qui m’enserrent,
son regard profond qui cherche mes yeux au-delà des étoiles éblouissantes
du subspace, et son souffle sur moi pantelante, bien plus grisant
que tous les fouets du monde.
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